special issue of EChoGéo
Police: les espaces de l’ordre, l’ordre en place?
Date limite d’envoi des articles : 25/10/2013
Ces dernières années, la police a été au cœur de nombreux débats scientifiques. Les écrits en histoire (Houte, 2010 ; Chevandier, 2012 ; Deluermoz, 2012), anthropologie (Fassin, 2011) ou encore en sciences politiques et sociologie (Dieu, 2000 ; Jobard, 2002 ; Loubet del Bayle, 2006 ; Ocqueteau, 2006) se sont multipliés sur la police et la gendarmerie. Les philosophes critiques, et en particulier Jacques Rancière (1990), réfléchissent eux aussi sur la police, non en tant que corps d’État mais entendu comme concept plus large de mode de gouvernement et système de régulation entre les individus.
Etonnamment, la géographie est restée en marge de ces réflexions, en dépit des travaux critiques anglophones de Steve Herbert sur la police de Los Angeles (Herbert, 1996) ou ceux plus récents de Mustafa Dikeç (2007) sur les banlieues françaises. Cet intérêt tout relatif pour les forces de l’ordre (police et gendarmerie), en particulier dans la géographie française, peut apparaître paradoxal dans la mesure où ordre et espace sont intiment liés. Cette dimension spatiale ne saurait se limiter à celle du contrôle. L’idée du présent appel à contribution est d’aller au-delà d’une vision foucaldienne qui envisagerait uniquement la police comme un dispositif omniscient de contrôle social et de surveillance pour comprendre de façon plus large la spatialité policière. Des territoires d’actions et d’intervention sont définis : la police peut être de proximité, de l’air et des frontières, de l’eau … La présence policière est requise dans certaines rues, routes et zones jugées symboliques et stratégiques tels les lieux touristiques. A l’inverse, il est parfois reproché aux policiers d’éviter certains espaces qualifiés de « sensibles » ou autres zones de « non droit ».
Par ailleurs, policiers et gendarmes utilisent quotidiennement certains outils géographiques tels la cartographie, la géolocalisation, les SIG (Manning, 2008). La technologie est elle-même vue comme un prolongement policier avec les caméras de vidéosurveillance, bracelets électroniques, puces RFID … Les forces de l’ordre en viennent ainsi à produire une/leur géographie, qui est elle-même révélatrice d’autres spatialités comme celle des politiques publiques avec leur « géographie prioritaire » et la « géoprévention ». La géographie de la police et de la gendarmerie semble se confondre avec la géographie de la criminalité et de la délinquance. La superposition des cartes de perception de l’insécurité, de plaintes et des votes électoraux est ainsi riche d’enseignements.
Dès lors, en France comme ailleurs, le regard du chercheur ne peut être qu’interpellé par cette lecture qui est aussi une production spatiale de l’ordre, une production policière de l’espace. Où les forces policières se concentrent-elles ? Comment ces différentes forces se déploient-elles sur le territoire ? Quels sont les principaux lieux d’intervention, points et zones à couvrir, et comment ces répartitions sont-elles justifiées par les décideurs ? Quels liens existe-t-il entre présence policière et espaces de la criminalité, et entre présence policière et espaces du sentiment d’insécurité ?
Les limites des lieux d’intervention sont tout aussi significatives et invitent à réfléchir aux découpages territoriaux et aux choix qui les sous-tendent. Ce point se révèle d’autant plus intéressant à explorer qu’à l’échelle internationale, les frontières se brouillent, notamment entre ville et campagne. En France, la dichotomie entre la police chargée de veiller sur la polis -et donc la cité-, et la gendarmerie, héritière de la maréchaussée, censée se déployer dans le monde rural, est-elle encore valable dans une société en partie périurbanisée ? Dans le même ordre d’idées, la possible concurrence entre police nationale et police municipale, police nationale et armée offre des pistes d’investigation : quels espaces jugés stratégiques échappent au contrôle des uns pour revenir aux autres (à l’instar des gares, aujourd’hui surveillées par des militaires) ? Le ministère de l’Intérieur se trouve-t-il dépossédé du contrôle de certains espaces au profit du ministère de la Défense ?
Envisager les forces de l’ordre comme un objet géographique invite également à s’interroger sur les connaissances empiriques des policiers et gendarmes. Celles-ci semblent fortement liées à leur lieu d’origine, ainsi qu’à leurs carrières professionnelles et trajectoires résidentielles.
Ce dossier thématique invite à décrypter les pratiques et discours « géographisant » de la police afin de comprendre les visions territoriales du maintien de l’ordre. Dans cette optique, le dossier fait appel à des contributeurs de différents horizons disciplinaires (géographie, sociologie, anthropologie, histoire, sciences politiques…). Les approches sortant du cadre français et/ou comparatives sont les bienvenues. Quelques entrées, non exhaustives, sont proposées :
Les articles, rédigés en français, en anglais, ou en espagnol comporteront environ 30 000 signes (plus les illustrations). Ils devront être envoyés avant le 25 octobre 2013 à Marie Redon (marie.redon@univ-paris13.fr ) et Armelle Choplin (armelle.choplin@univ-paris-est.fr) avec copie à Béatrice Vélard (bvelard@univ-paris1.fr), secrétaire éditoriale, qui les transmettra aux évaluateurs. Le dossier sera publié dans le n°28 d’EchoGéo (avril-juin 2014).
Coordination du dossier : Marie Redon, Maître de conférences, Université Paris 13 et Armelle Choplin, Maître de conférences, Université Paris-Est Marne-la -vallée.
Ultimo aggiornamento 04/Mar/2013 alle 16:18
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